Au pré de mon arbre !
Le saule majestueux qui borde la prairie n’en croit toujours pas ses branches ! Bien entendu, il a senti que quelque chose d’inhabituel se préparait quand la veille, un drôle d’oiseau armé d’une machine au boucan infernal s’était amusé à lui égaliser son houppier. Ses doutes se levèrent quand tôt le matin du jeudi, une dizaine d’hommes envahissaient la prairie, « sa prairie » !
« N’est-ce pas là un chapiteau que des ouvriers communaux et des volontaires de la MJ comptent dresser dans mon domaine, en plein milieu de la cité ? »
Ahmed, le brigadier, il le connaît par cœur ce chapiteau pour l’avoir érigé déjà très souvent sur le territoire de la commune. Le montage ? C’est à plat sur le sol et pas autrement dit-il . L’équipe, suivant scrupuleusement ses ordres, assemble les piliers et la structure du toit. D’épais câbles d’acier permettent ensuite, à la force des bras, de mettre à la verticale les parties ainsi assemblées. Des traverses et des ferrures fixent solidement les éléments les uns aux autres et les bâches de toit sont tirées, à l’aide de cordes cette fois, dans des glissières idoines. D’énormes blocs de bétons sont enfin disposés au quatre coins pour arrimer l’édifice au sol en cas de grand vent.
Merci Ahmed ! Merci d’avoir tordu le cou une bonne fois pour toute à cette croyance ancrée au plus profond du citoyen lambda affirmant que l’ouvrier communal puiserait son énergie d’un gastéropode quelconque. Que nenni ! L’ouvrier communal a bien souvent une journée chargée et n’est pas le clampin qu’on croit.
« Un chapiteau ! Et pour faire quoi ? »
« Une fête de quartier ! Dans ma prairie ? »
« Imaginez-vous cela ? »
De mémoire de saule on n’avait jamais vu ça ! L’émotion fût si forte qu’il en pleura de joie ! Ça commençait aussi à papoter dans les rues de la cité.
« T’as vu les tentes dans la prairie ? Il y en a au moins cinq ! J’ai même vu un forain ! Ça va vraiment être la fête, c’était pas une rumeur. »
Bien entendu que ça allait être la fête ! Et quelle fiesta mes amis !
La « prairie » chère à notre saule s’est remplie de tentes qui ont proposé des animations de circonstance : une initiation au crossage au paillet, un stand mécanique vélos, la découverte de jeux en bois, la possibilité de se faire grimer et la découverte du « space painting », une technique de peinture très particulière. Un forain est venu spécialement pour l’occasion proposer une pêche aux canards. Le château gonflable quant à lui a subit les terribles assauts auxquels il est habitué.
C’est donc sourires aux lèvres que les habitants du quartier, tout heureux de l’événement, ont passé ce week-end à se retrouver en famille, à revoir d’anciennes connaissances parfois oubliées et à écouter de la musique au gré des concerts proposés. Il faut bien avouer que nous avons eu de la chance parce qu’il ne manquait aucun ingrédient à cette belle réussite, à commencer par un public enjoué qui faisait vraiment plaisir à voir, ensuite une équipe organisatrice du tonnerre et pour parfaire le tout, du soleil, du soleil et encore du soleil. Notre chance ne s’arrête pas là ! Nous avons proposé la transmission sur grand écran du match de l’équipe belge au mondial 2018, soldé par une victoire… des Belges !
Je me suis même laissé surprendre à remercier le ciel. Rendez-vous compte !
Au final, tout ceci n’a été possible que grâce à la volonté de personnes du quartier désireuses de le faire revivre, et des jeunes de la MJ impliqués jusqu’au bout avec parfois des propositions plutôt drôles comme ce coin fumeur de « cigarettes qui font rire », aménagé à la hâte pour « faire propre », dixit les preneurs de l’initiative. Les gentilles dames du service médical de la tente voisine rigolent encore, croyez-moi sur parole !
Il semblerait au final que ce fût une belle réussite, comme beaucoup se plaisent à le dire, organisateurs en premier. Il y aurait bien évidemment des choses à améliorer, d’autres à éviter et à régler mais la maison des jeunes et les Petit Hornutois les plus concernés ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. La seconde édition est déjà d’actualité et nous espérons bien nous rencontrer régulièrement pour remettre le couvert et proposer des petits événements intermédiaires pour garder la flamme.
Notre ami le saule quant à lui, pleure encore ! De tristesse cette fois de voir sa « prairie » désespérément vide. Jusqu’à sa prochaine coupe !
Philippe