Pas de lune ce soir sur Petit-Hornu ! Du tout ! C’est la nouvelle lune, le moment du mois où elle est invisible la nuit. Qui s’en soucie encore à part les amateurs d’astronomie à la recherche d’un monde merveilleux, Pierrot pour écrire à sa meuf, ou les jardiniers adeptes du calendrier lunaire pour faire pousser de beaux légumes ? Peu de monde à mon avis !
Aujourd’hui à la MJ, ça nous embête que madame la lune se cache parce que c’est une soirée un peu spéciale. C’est le premier jeu de nuit de l’année dans les bois ! Et un jeu de nuit sans lune, on voit tout de suite moins bien, d’autant plus que les lampes de poche ont été interdites !
Une centaine de mètres séparent le bois de la maison des jeunes. Cent mètres avant de se retrouver dans le noir complet. Ce soir là, plus on s’approchaient de l’orée, plus le groupe se resserrait autour des animateurs qui eux n’ont peur de rien bien entendu ! Les vaillants animateurs n’en étaient pas à leur première escapade nocturne ! C’était par contre une première pour la plupart des participants et certain n’en menaient pas large !
Il fût un temps où les bois étaient le terrain de jeux favoris des arsouilles du village. Qui n’a pas en souvenir ces moments où, surpris par la tombée du jour, nous nous retrouvions encore dans la forêt les premières soirées d’hiver. Il n’est pas tard mais le soleil est couché et l’obscurité gagne du terrain. Nous retardions la sortie du bois en se disant que nous avions encore un peu de temps. Et puis boum ! La nuit est là. On aperçoit l’orée du bois, légèrement éclairée par le dernier lampadaire du village ! En tout cas c’est par là qu’on devait sortir nous en étions sûr. Les petits bruits qui d’ordinaire en plein jour nous indiffèrent totalement prennent une autre dimension la nuit dans les bois. C’est que nous ne sommes pas seul ici et ça commence à bouger pas mal autour de nous ! Certainement toutes sortes de bestioles qui profitent de la tranquillité de la nuit pour vaquer à leur occupation sylvestre, se souciant peu de nous. Mais peut-être des farfadets ou autres lutins prêts à nous jouer de vilains tours comme ils savent si bien le faire ! Vite se dépêcher de sortir d’ici ! Nos pas s’accélèrent ! Et plus nous accélérons plus le vent siffle à nos oreilles, nous donnant l’impression d’être poursuivi ! Et les pas d’accélérer à nouveau pour finalement finir par un sprint, nous libérant ainsi des dangers de la forêt. Ouf nous avons été les plus rapides cette fois ci mais qu’en sera t’il la prochaine fois ? Nous récupérons notre souffle adossé à notre lampadaire préféré.
Cette nuit sans lune nous avons pénétré dans le bois, serré comme des sardines, bien certain que rien ne pourra nous arriver. Après tout, les farfadets ne sont que des souvenirs de gosses. Qui voulez-vous rencontrer ici à part peut-être d’autres farfelus venus jouer comme nous. De temps en temps un rai de lumière suspect traversait la nuit noire pour aller se poser plus loin sur le sentier, juste pour voir, se rassurer. Et au bout d’une centaine de mètres parcouru, nous pouvions apercevoir en nous retournant le dernier lampadaire du village.
Se retrouver dans les bois la nuit suscite toujours autant l’imagination et les pires scénarios. Des peurs oubliées se réveillent et même nous autres adultes jouons les fiers à bras mais il y a quand même toujours cette part de doute.
Et si c’était vrai finalement!
Et puis il y a cette rumeur qui circule dans Petit-Hornu ! On aurait aperçu, au clair de lune pour le coup, en haut du terril de l’Avaresse, la silhouette d’un chien, un grand chien ! Moi, c’est le saule, le gardien du potager qui m’a raconté ! Il a entendu, au hasard d’une conversation de passants, que des personnes de la cité avaient vu de leurs yeux vus cette fameuse silhouette. Sauf que tout bien réfléchi, qu’est-ce qu’un chien irait faire en haut du terril, la nuit ? On n’a jamais vu ça ! Ça n’est pas la place d’un chien ! Et puis la semaine précédente, on a pu lire dans la presse que le loup a fait une apparition dans le Limbourg ! Jusqu’à Petit-Hornu, c’est une promenade de santé pour un loup en pleine forme.
Mais c’est juste une rumeur non ?
Évidemment à la MJ nous n’avons de secret pour personne ! Sur le chemin du retour, nous nous sommes empressés de raconter ça aux gamins venus jouer cette nuit, tout content de savoir qu’enfin le loup revient au bercail après en avoir été chassé comme un malpropre.
« Quoi ? Un loup ? Si j’avais su je serais pas venu ! »
« Un loup ça vit en meute non ? »
« Ils vont nous attaquer ! »
« Chuuttt ! Écoutez ! J’ai cru entendre un bruit là plus loin ! »
« Vite sortons d’ici ! Là-bas ! Une lumière !
Et si c’était vrai finalement !